Ce qui épuise le plus, ce ne sont pas les objectifs… mais les contradictions !

« Soyez autonome… mais demandez l’autorisation. » « Innovez… mais ne prenez pas de risques. » Ces injonctions paradoxales sont devenues le quotidien de nombreux professionnels. Et c’est cette double contrainte permanente, bien plus que la charge de travail, qui provoque l’épuisement.

 

Dans mes entretiens individuels, j’entends régulièrement ces griefs.

Claire, responsable de projet :
« On me demande d’être autonome… mais si je décide seule, je me fais recadrer. »

Thomas, manager d’équipe :
« On me dit de mettre l’humain au centre… mais ce qu’on regarde, ce sont les chiffres. »

Sarah, cadre RH :
« On m’encourage à parler de mes émotions… mais si je le fais, on me reproche mon émotivité. »

Marc, chef de service :
« On nous demande une production plus professionnelle… mais on doit se débrouiller sans budget supplémentaire. »

 

Derrière ces contradictions, les mêmes questions reviennent sans cesse : Comment savoir ce qu’on attend vraiment de moi ? Comment ne pas me tromper ? Comment tenir dans cette ambivalence permanente ?

 

Démotivation, stress, burn out : ce sont ces contradictions qui épuisent !

Ce n’est pas une question de capacité ou de compétence individuelle. Ces paradoxes ne sont pas des dysfonctionnements isolés : ils sont des caractéristiques structurelles du système, la conséquence logique de son fonctionnement.

 

Ces doubles contraintes naissent d’un écart entre deux réalités :

D’un côté, les valeurs affichées :
« Nous encourageons la prise d’initiative », « Soyez autonomes, innovants, authentiques ».

De l’autre, les contraintes réelles et les habitudes héritées :
Processus rigides, contrôles multiples, pressions économiques, inertie du « On a toujours fait comme ça ».

Le message implicite devient alors : « Respecte les règles, ne fais pas de vagues, reste dans le cadre. »

Le piège de la double contrainte

L’individu doit satisfaire les deux exigences à la fois :

  • Être autonome… tout en demandant l’autorisation
  • Innover… sans prendre de risques
  • Être authentique… sans déranger

Incapable de trancher entre ces injonctions contradictoires, l’organisation transfère la charge à l’individu : « Adapte-toi », « Sois résilient ». Il devient la seule variable d’ajustement du système.

« On sait que c’est compliqué, mais trouve un moyen ! »

C’est précisément cela qui épuise : porter seul la responsabilité de résoudre des contradictions systémiques. Damned if you do, damned if you don’t.

Les tensions classiques dans les organisations

Ces contradictions prennent des formes variées, mais récurrentes :

  • Aller vite vs bien faire
  • Oser innover vs éviter les risques
  • Donner de l’autonomie vs garder le contrôle
  • Prendre soin des personnes vs atteindre les chiffres
  • Limiter les coûts vs soigner l’image
  • Encourager la transparence vs protéger l’institution

Plutôt que de trancher ces dilemmes, l’organisation les « pousse » vers l’individu, qui hérite de la responsabilité sans avoir les moyens réels de l’exercer.

Ce que peut faire la personne

Face à ces contradictions systémiques, plusieurs postures permettent de reprendre du pouvoir d’agir :

1. Nommer la contradiction

« Je vois une contradiction entre X et Y. Comment fait-on concrètement ? »

Mettre des mots sur le paradoxe permet de clarifier les règles du jeu et de sortir de l’implicite.

2. Négocier les priorités

« Si on veut un résultat très professionnel avec ce budget, qu’est-ce qu’on priorise ? Qu’est-ce qu’on accepte de ne pas faire ? »

Cela force un dialogue sur les résultats réellement attendus.

3. Choisir consciemment

Accepter l’imperfection de manière assumée plutôt que s’épuiser à vouloir l’impossible. Et exprimer clairement cette impossibilité.

Exemple :
« Avec les ressources actuelles, je peux livrer X ou Y, mais pas les deux dans les délais. Que privilégie-t-on ? »

Ces stratégies ne résolvent pas le problème à la source, mais elles permettent de ne plus en porter seul le poids.

 

Et parfois, il faut savoir partir.

Lorsque les contradictions sont systématiques, que le dialogue reste impossible, et que l’organisation refuse d’assumer ses choix, la situation devient toxique. Dans ce cas, la seule stratégie saine peut être de quitter l’environnement. Ce n’est pas un échec personnel, c’est reconnaître qu’on ne peut pas, seul, réparer un système qui ne veut pas changer.

 

Et pour l’organisation ?

La vraie transformation vient quand l’organisation prend sa part de responsabilité. Cela passe par cinq leviers :

1. Clarifier

Identifier et arbitrer explicitement les tensions au lieu de les laisser dans le flou.

2. Assumer

Affirmer clairement les choix : « Cette fois, nous privilégions la qualité sur les délais » ou « Nous acceptons plus de risques pour favoriser l’innovation ».

3. Équiper

Fournir du temps, un budget et une formation cohérents avec les objectifs annoncés.

4. Dialoguer

Créer des espaces de parole où les équipes peuvent discuter ouvertement des contradictions vécues, sans crainte de représailles.

5. Accepter l’évolution

Reconnaître que certains arbitrages sont temporaires et qu’ils évolueront selon le contexte.

 

Le défi collectif

Le vrai défi ? Passer des doubles contraintes aux choix assumés.

Sortir des doubles contraintes, ce n’est pas demander plus de résilience individuelle. C’est décider, en tant qu’organisation, en tant que manager, quels arbitrages on assume collectivement.

C’est aussi créer les conditions pour que ces choix puissent être questionnés, ajustés, et discutés ouvertement.

Besoin d’accompagnement ?

Avec PePSS, j’accompagne les collaborateurs, les équipes et leurs managers pour :

  • Clarifier ces tensions
  • Nommer les contradictions
  • Transformer les doubles contraintes en dialogue constructif
  • Retrouver du pouvoir d’agir, individuellement et collectivement

 

 

Vous vous reconnaissez dans ces situations ? Vous aimeriez sortir de l’épuisement lié aux contradictions professionnelles ? Parlons-en.

 


 

Coaching professionnel et accompagnement d’équipes – Province de Luxembourg (Arlon, Virton, Etalle, Habay)

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